
La critique ludique et les influenceurs
DrĂŽle de sujet auquel je m’attaque lĂ …
Mais l’envie d’en parler m’est venue suite Ă un tweet d’un acteur ludique (Lapinesco PixieGames pour ne pas le citer) « se plaignant » d’un influenceur peu poli demandant une boĂźte de jeu pour une critique.

Pourquoi cet article ?
Vous allez rire mais en lisant ce Tweet, je me suis posé la question :
« Suis-je un influenceur? »
Et aprÚs réflexion sur le sujet, ma question suivante a été :
« Suis-je légitime à demander des boßtes pour des reviews ? »
J’ai donc dĂ©cidĂ© de me poser sur le sujet et mettre mes rĂ©flexions dans un article.
DJUF, des origines Ă maintenant…
VaL et moi avons lancé Des Jeux Une Fois le 11 mars 2015 avec un premier article décrivant nos activités (que vous pouvez lire ici).
L’idĂ©e Ă©tait simple, faire un blog sur le monde ludique belge. A l’Ă©poque, quelques sites spĂ©cialisĂ©s existaient mais peu de petits acteurs et encore moins de Belges (en tout cas, pas connus par nos humbles personnes).
L’initiative a Ă©tĂ© apprĂ©ciĂ©e et soutenue. Rapidement, nous avons rencontrĂ© de nombreuses personnes du monde ludique belge, certains sont mĂȘme devenus des amis proches, des compagnons de jeux rĂ©guliers, des partenaires… Bref, je me sens chanceux en Ă©crivant ces mots.

En 5 ans, les choses ont beaucoup Ă©voluĂ© chez nous… on est passĂ© d’un blog Ă un site. L’Ă©quipe s’est agrandie, s’est modulĂ©e, s’est dĂ©veloppĂ©e, les activitĂ©s se sont diversifiĂ©es… c’est maintenant 7 personnes qui Ćuvrent en tant que membres de DJUF et nous avons la chance d’accueillir des guests qui viennent nous prĂȘter leur plume.
Mais en 5 ans, ce sont Ă©galement d’autres mĂ©dias amateurs qui sont apparus en Belgique (j’utilise le terme amateur pour qualifier le fait que ce n’est pas leur travail, le contenu de certains est d’un professionnalisme remarquable), par exemple :
– Ludidice (ma super copine hyper productive),
– Girl dot Games (la reine du makeup J2S),
– Inspired Gaming (le professeur),
– La copine Geek (la charmante instagrameuse),
– …
DĂ©solĂ© pour les autres mais vous ĂȘtes nombreux maintenant, j’ai citĂ© les 4 que je connais personnellement…
Et lĂ , je ne vous parle que des copains belges… le nombre de pages Facebook, comptes Instagram, chaĂźnes YouTube consacrĂ©s aux jeux de sociĂ©tĂ© a explosĂ© et vous avez maintenant l’embarras du choix. Les styles et les spĂ©cificitĂ©s de chacun sont Ă©galement trĂšs variĂ©s.
Il faut dire aussi qu’en 5 ans, le monde ludique a bien changĂ©… plus de joueurs, plus d’Ă©diteurs, plus de jeux, plus d’acteurs… Ne me demandez pas le lien de cause Ă effet prĂ©cis mais je pense que le JDS connait tout simplement une pĂ©riode de croissance (et il semblerait que le pic ne soit pas encore atteint) et que par consĂ©quent, le secteur se dĂ©veloppe. Il n’y a qu’Ă voir la taille des festivals de jeux qui n’arrĂȘte pas de grandir et le nombre d’Ă©vĂ©nements ludiques qui explose.
Ma vision de la « critique »
Alors c’est simple, chez DJUF, on parle de jeux de sociĂ©tĂ© principalement dans 2 catĂ©gories d’articles :
– Les jeux belges (on essaie de couvrir les sorties de tous les Ă©diteurs belges, des auteurs et des illustrateurs),
– Nos coups de cĆur.

Pour moi, un article de prĂ©sentation d’un jeu comprend :
– un pitch du jeu
– une description de son fonctionnement
– une prĂ©sentation du matĂ©riel
– un avis qui permet au lecteur de savoir si le jeu est fait pour lui
– une fiche technique
La dĂ©finition de critique (ici) : jugement ou apprĂ©ciation / personne qui porte un jugement sur des Ćuvres artistiques / art de juger, analyser des Ćuvres.
Les critiques les plus connues sont sûrement celles du cinéma.
Nos articles sont donc une forme de critique car nous allons les apprécier et les analyser.
Dans le cas d’un coup de cĆur, l’avis (autrement dit la critique) va ĂȘtre positif, il n’y a pas photo sinon ça ne serait pas un coup de cĆur.
Il faudra nĂ©anmoins savoir mettre en avant les dĂ©fauts du jeu s’il en a (par exemple : ne fonctionne pas bien Ă 2 joueurs) et ne pas se laisser entraĂźner par son ardeur sur le jeu (ça, j’avoue, j’ai du mal Ă le faire).
Et surtout, ne pas perdre de vue que ce n’est pas parce que je l’adore que quelqu’un d’autre va penser la mĂȘme chose.

Dans le cas d’un article sur un jeu belge, je me retrouve parfois Ă devoir parler de jeux qui ne me plaisent pas. Car ils ne sont pas mon style de jeu (les party games par exemple) ou je n’ai pas Ă©tĂ© sĂ©duit par le thĂšme (c’est hyper important pour moi).
L’essentiel sera alors de pouvoir identifier les mĂ©caniques, le public cible du jeu et de savoir mettre en avant cela. L’utilisation de la comparaison Ă d’autres jeux est un bon moyen (ce qui parle le plus facilement aux joueurs).
J’en profite pour signaler que je n’aime pas les systĂšmes de cotation des jeux, trop dĂ©pendants du profil du joueur.

Un petit exemple : Pipi Caca Culotte – c’est un Party Game et c’est graveleux… les 2 choses qui ne m’attirent pas du tout dans un jeu de sociĂ©tĂ©. Mais par contre, c’est original comme association et il existe un public pour cela. Et surtout, il y a des moments idĂ©aux pour le sortir.
Dans cet article, mon objectif a Ă©tĂ© que ce public, qui est potentiellement preneur, ait envie de l’essayer pour se faire son propre avis sur celui-ci.
Extrait « Si vous trouvez que les party games dâapĂ©ro sont trop soft, ce jeu est fait pour vous !!!«Â
J’avoue n’avoir jamais eu Ă Ă©crire sur un jeu qui ne fonctionne pas… et si un jour cela m’arrivait, je m’exĂ©cuterais et pointerais du doigt un bug ou une incohĂ©rence. Car lĂ , si le job d’Ă©dition n’est pas bien fait, il ne faut pas que les joueurs subissent cela.
J’ai tout de mĂȘme parfois le sentiment que tout va trop vite et que l’on voit plus souvent qu’avant des correctifs apparaitre pour de nouveaux jeux.
En parlant d’avant, je me rappelle de la premiĂšre fois oĂč j’ai entendu parler du terme Martingale (exploiter un dĂ©faut pour en faire un moyen de gagner). J’ai Ă©galement eu la chance de ne jamais recourir Ă ce terme dans un article.
J’ai par contre assez souvent critiquĂ© des choix Ă©ditoriaux… souvent par rapport Ă la taille de la boĂźte (je dĂ©teste les boĂźtes plus qu’Ă moitiĂ© vides qui prennent de la place dans la ludothĂšque) ou sur le prix d’un jeu (rappelez-vous du scandale lors de la sortie de « A la gloire d’Odin »). Ce sont pour moi des critĂšres objectifs que nous pouvons apprĂ©cier avec un systĂšme de valeur commun.
Ma derniĂšre expĂ©rience en date est la campagne Kickstarter de Paris de Game Brewer pour laquelle, j’ai eu la chance de recevoir en prĂȘt un prototype, de faire partie des reviewers de la campagne et d’avoir un prĂ©-accĂšs Ă la page de la campagne pour donner un avis.
J’ai testĂ© le jeu et adorĂ© celui-ci, par contre, je n’Ă©tais pas du tout d’accord avec le positionnement financier de la campagne. Ceci a Ă©tĂ© exprimĂ© sur la page de la campagne et l’Ă©tait dans l’article consacrĂ©.
Heureusement, je n’Ă©tais pas le seul Ă avoir le mĂȘme avis et juste avant le lancement officiel, l’Ă©diteur a choisi une nouvelle approche qui s’est avĂ©rĂ©e bien plus intĂ©ressante et qui a permis de financer le jeu. J’ai donc corrigĂ© mon article 1h avant publication. Mais si le changement n’avait pas eu lieu, j’aurais choisi de signaler mon dĂ©saccord avec le prix. Kickstarter restant un monde Ă part, cela n’aurait peut-ĂȘtre pas eu d’influence.

J’ai d’ailleurs apprĂ©ciĂ© la vidĂ©o de « L’Ă©cole du jeu » qui explique pourquoi un des membres de leur Ă©quipe n’a pas apprĂ©ciĂ© Les tavernes de la VallĂ©e profonde (ici). Dire honnĂȘtement ce qui ne lui a pas plu, non dans le but de casser le jeu, mais juste d’exprimer un avis objectif.
Parfois, le fait de savoir ce qui a dĂ©plu Ă certains, peut tout simplement vous donner Ă©galement envie (pour savoir si vous avez le mĂȘme avis ou au contraire, ce qui lui a dĂ©plu est quelque chose qui vous plait habituellement dans le jeu).
Je connais d’ailleurs plusieurs personnes qui ne s’intĂ©ressent qu’aux avis nĂ©gatifs pour se faire une idĂ©e.
Donc en résumé, pour moi :
– L’importance de dire les choses.
– Une bonne critique permettra aux joueurs d’identifier un jeu qui est susceptible de leur plaire et de leur donner l’envie de l’essayer.
– Ne pas oublier que mon avis n’est pas lĂ©gion.
Et les lecteurs dans tout ça ?
Vous l’aurez remarquĂ©, j’attire votre attention sur l’importance de dire les choses dans la partie critique. Et le fait que quelqu’un n’apprĂ©cie pas un jeu ne veut pas dire que je ne l’apprĂ©cierai pas.
En tant que lecteur, je ne pourrais que vous conseiller de lire plusieurs avis pour savoir si un jeu vous correspond ou pas.
Je prendrais un exemple simple : Le Bien et Le Malt.
La premiĂšre critique que j’ai lue Ă©tait celle de Gus & Co. Et le jeu s’y faisait complĂštement descendre (j’ai d’ailleurs peu apprĂ©ciĂ© le ton employĂ© mais c’est un avis personnel). La semaine suivante, je lis chez DĂ©dale, coup de cĆur du mois. Cela a suffi pour attiser ma curiositĂ©. RĂ©sultat des courses, un jeu que j’ai adorĂ© et l’un des plus jouĂ©s en 2018 Ă la maison.
Je n’aime pas la critique nĂ©gative surtout quand elle est agressive… mais les avis nĂ©gatifs peuvent aussi ĂȘtre positifs. Je connais des personnes qui ne consultent que des avis nĂ©gatifs pour se faire une idĂ©e…
D’ailleurs, sur des sites de vente en ligne, j’avoue regarder autant les positifs que les nĂ©gatifs… donc je peux comprendre la consultation de ceux-ci mĂȘme pour les jeux de sociĂ©tĂ©. Mais ici, on parlera d’avis et non de critique.

Lire des critiques, c’est bien, mais la meilleure maniĂšre de se faire une idĂ©e est d’essayer le jeu pour vous faire votre propre avis. Il y a de nombreux festivals, des Ă©vĂ©nements ludiques, des ludothĂšques, des bars Ă jeux, des clubs, des copains… bref, parfois il vaut mieux patienter un peu pour acquĂ©rir un jeu qui sortira de votre ludothĂšque.

Et pour les Kickstarters me direz-vous…
Et bien mĂȘme conseil, lisez la page de la campagne, lisez les rĂšgles, regardez les reviews et essayez de vous imaginer Ă une table Ă jouer Ă ce jeu (et profitez des salons pour tester les prototypes quand c’est possible). Il est facile de se laisser emporter par la hype ou par une plĂ©thore de StrechGoals. Mais au fond, le jeu peut avoir tout le plus beau matĂ©riel du monde, s’il n’est pas bon de base, il ne le sera pas plus avec tout cela.
On a Ă©crit un article sur le sujet Ă l’Ă©poque avec mon bon Al (mars 2016), c’est encore d’actualitĂ©, vous pouvez donc le consulter ici.
Et les licences, les sĂ©ries et les extensions me diriez-vous…
Dans le cas d’une extension, on est souvent emballĂ© de pouvoir prolonger son expĂ©rience sur un jeu qu’on adore. La vraie question est « Est-ce que le jeu en a besoin ? Ou est-ce que ça va rĂ©ellement apporter quelque chose au jeu ? ».
Pour les licences, une version ne vaudra peut-ĂȘtre pas une autre… Par exemple, un Roll & Write de mon jeu prĂ©fĂ©rĂ© va-t-il me plaire d’office ? La rĂ©ponse va surtout venir de vos goĂ»ts. Je suis un immense fan de Settlers, j’ai adorĂ© les 2 versions cartes. Et le Roll & Write fait totalement flop alors que je l’attendais avec impatience.
Pour les sĂ©ries, un volume deux sera-t-il une bonne chose ? Prenons Azul, j’adore le premier, le second m’a moins convaincu et le troisiĂšme est mon prĂ©fĂ©rĂ©. La mĂ©canique commune me plaĂźt mais ce sont des jeux diffĂ©rents. Autre exemple est TrĂšs futĂ© que j’ai tellement jouĂ©, le Vraiment trĂšs futĂ© le mĂȘme succĂšs Ă la maison.
Encore une fois, ne pas foncer tĂȘte baissĂ©e.

Je ne me considĂšre pas spĂ©cialement comme le spĂ©cialiste du jeu de sociĂ©tĂ©. Je sais de quoi je parle mais il y a des personnes bien plus calĂ©es que moi et en fonction de ce que l’on cherche dans un avis, il faut aussi se tourner vers un avis comprĂ©hensible. Il y a des avis trĂšs techniques, des avis lĂ©gers sur les sensations, des avis globaux, des avis prĂ©cis.
Donc si le ton d’un reviewer, son approche et ses goĂ»ts vous plaisent, il est intĂ©ressant de revenir Ă lui pour avoir un avis qui vous correspondra.
J’aime beaucoup les copains de Les recettes ludiques, je trouve qu’ils ont une chouette approche. Ils se prĂ©sentent d’ailleurs comme des crĂ©ateurs de contenu dans la vidĂ©o du Labo des jeux, j’aime cette prĂ©sentation. A Cannes, j’ai eu l’occasion d’assister Ă un dĂ©briefing live de leur journĂ©e. A la simple question, « vous avez vu quoi de beau? ». Ils ont sorti leur GSM et on a parcouru les photos de leurs parties. Des mots justes, du feeling, de la technique, … Ils devraient proposer ce genre de format de vidĂ©o, ça serait l’idĂ©al pour moi. Et par exemple, leur vidĂ©o me parle donc je prends le temps de consulter leur avis (mĂȘme si je ne suis pas aussi gros joueurs qu’eux).

Et parfois, le meilleur avis Ă suivre, c’est une personne qui aime un jeu… Ca fait longtemps que j’entends parler de Res Arcana. Et pourtant, toujours pas essayĂ©, ni craquĂ© sur un achat compulsif. Je ne sais pas pourquoi, je n’Ă©tais pas attirĂ©. Mais Ă force de voir des Tweets de V-Mazuca sur ce jeu, j’ai fini par ĂȘtre curieux… je l’ai vu dĂ©fendre ce jeu, faire campagne pour son Ă©lection Ă l’as d’or, en parler encore et toujours. Alors qu’il n’a aucun lien personnel avec le jeu Ă part le fait de l’aimer, c’est intriguant. Je l’ai donc au final ajoutĂ© Ă une commande de jeu de confinement et en une seule partie, j’ai compris la raison, ce jeu est succulent. Donc souvent, une personne passionnĂ©e par un jeu est la meilleure des critiques.

Les boĂźtes gratuites
PremiĂšre chose Ă prendre en compte : je dĂ©teste quĂ©mander des boĂźtes de jeu, et ce mĂȘme aprĂšs 5 ans, je me sens toujours fort mal Ă l’aise avec ce fait.
Je me rappelle la premiĂšre boĂźte que l’on a reçue, c’est un Piratoons d’Act In Games. Ce fut un moment spĂ©cial car nous l’avons reçu en main propre, d’un petit Ă©diteur et avec des mots d’encouragement. Et ce, aprĂšs que nous ayons Ă©crit l’article sur le jeu que nous avions testĂ© lors d’une soirĂ©e jeux. Un geste purement dĂ©sintĂ©ressĂ© par l’Ă©diteur, juste un remerciement que nous n’attendions pas (et qui m’a fort touchĂ©).
Je ne vais pas vous mentir, on reçoit des jeux chez Des Jeux Une Fois. Certains proviennent de distributeurs, d’autres d’Ă©diteurs et d’autres d’auteurs dans le cadre de campagne de financement participatif.
Nous avons des partenariats avec certains acteurs (je ne saurais pas vous dire lesquels exactement mais par souci de transparence, on a créé une page pour les mettre en avant. Et comme je dĂ©teste cette partie… ce n’est donc pas moi qui m’en occupe – Big Up Ă Daniel qui s’occupe dorĂ©navant de cela chez nous). Mais il est clair que recevoir un jeu ne veut pas dire que nous en parlerons, notre politique Ă©tant assez claire Ă ce sujet et nous la communiquons d’ailleurs ouvertement.
Lorsque des jeux nous sont proposĂ©s et qu’ils n’intĂ©ressent aucun membre de l’Ă©quipe (sur base du pitch ou des informations fournies), nous demandons Ă ce que le jeu ne nous soit pas envoyĂ©. Et si nous recevons un jeu non sollicitĂ©, nous n’en parlerons pas si celui-ci ne nous a pas sĂ©duit ou s’il n’est pas belge. Il y a suffisamment de jeux qui nous plaisent que pour se focaliser sur ceux-ci.

A cotĂ© de cela, il est parfois dommage de ne pas pouvoir tout tester car on rate forcĂ©ment des bons jeux. Mais parfois, nous sommes sollicitĂ©s par des Ă©diteurs pour nous soumettre un jeu. Avec les conditions de ne pas forcĂ©ment en parler si cela ne nous plait pas, nous recevons la boĂźte et lĂ , c’est la bonne surprise… un jeu dont on n’attend rien et qui pourtant vous embarque. Et quand j’ai la chance d’Ă©crire lĂ -dessus, je suis aux anges.
Et pour illustrer cela, je voudrais parler de OldChap Games qui nous a d’abord soumis Panic Island avec une trĂšs chouette communication amicale. J’ai Ă©tĂ© sĂ©duit pas la dĂ©marche et seulement ensuite par le jeu. On a Ă©tĂ© sollicitĂ© pour tester la version kids et re-succĂšs. Alors quand on nous propose La Fiesta de Los Muertos, on dit OUI… et on Ă©crit un article sur un jeu super qui ira jusqu’Ă ĂȘtre nominĂ© pour l’As d’or. C’est lĂ qu’on se dit qu’on a bien fait de s’intĂ©resser Ă ce petit Ă©diteur qui a fait la dĂ©marche de nous contacter. Au fond, est-ce que ce n’est pas pour lui que je fais ce que je fais…

Pour ma part, en tant que membre de DJUF, de temps en temps, on me demande si je veux m’occuper d’un jeu belge (reçu ou demandĂ©), si j’ai du temps (pour le tester et l’Ă©crire), je m’en occupe et j’essaie de le faire correctement. La soumission des titres est souvent orientĂ©e sur le profil de joueur des membres. Je suis par exemple souvent au rendez-vous des Geek Attitudes Games et des Game Brewer. Je teste les diffĂ©rents modes de jeu, si possible avec des joueurs diffĂ©rents (car oui, les joueurs autour de la table font aussi la partie). Dans ce cadre, la critique est toujours plus compliquĂ©e que celle d’un coup de cĆur car le jeu ne nous plaira peut-ĂȘtre pas. J’en reviens au chapitre prĂ©cĂ©dent sur ma maniĂšre de traiter les jeux.

La plupart des coups de cĆur que j’Ă©cris sont sur des jeux que j’achĂšte ou que je reçois lors d’occasion (offerts par ma chĂ©rie qui sait que ce sont mes cadeaux prĂ©fĂ©rĂ©s ou par les copains). Plus de 90% de ma ludothĂšque est remplie de jeux que j’ai achetĂ©s. Et plus le temps passe, plus je suis sĂ©lectif dans l’achat de jeux… avec 500 Ă la maison, on a de quoi faire.
Je me sens plus lĂ©gitime d’Ă©crire sur un jeu que j’ai achetĂ©, testĂ©, aimĂ© et ce au point de vous en parler.
J’ai aussi le plaisir de recevoir quelques boĂźtes de prototypes Kickstarter pour des reviews officielles de campagne. Quelque chose que j’affectionne car ici, il y a encore la possibilitĂ© de faire un retour Ă l’Ă©diteur sur le jeu. L’avis Ă©mis a Ă©galement un impact sur la campagne, la communautĂ© qui se retrouve autour du jeu et qui fera que celui-ci verra le jour (ou pas).
J’Ă©cris aussi parfois sur des campagnes que nous n’avons pas eu l’occasion de tester. Et lĂ , l’exercice est d’arriver Ă compiler suffisamment d’informations sur le jeu pour donner une idĂ©e Ă monsieur et madame tout le monde de soutenir un jeu.

Quand j’ai commencĂ© Ă jouer, il y avait beaucoup moins de jeux qui sortaient. C’Ă©tait plus facile de suivre les sorties, de tester une bonne partie. A l’heure actuelle, c’est une tĂąche impossible. Je suis de nombreux rĂ©seaux sociaux spĂ©cialisĂ©s, je lis les articles sur le net, je regarde des vidĂ©os… et mĂȘme comme ça, je ne suis pas certain que je ne rate pas de super jeux.
Alors pour un site qui parle de jeux, qui n’est pas professionnel, c’est compliquĂ©. Il est impossible de tout couvrir, de tout tester et encore moins de tout acheter. C’est aussi pour cela que des entitĂ©s comme la nĂŽtre sollicitent parfois les acteurs pour obtenir des jeux.
GĂ©nĂ©ralement, ce sont les distributeurs qui nous fournissent ces boĂźtes, mais parfois, l’Ă©diteur lui-mĂȘme.
Mais qui est donc lĂ©gitime pour demander des boĂźtes me direz-vous ? Et bien je n’ai pas de rĂ©ponse lĂ -dessus. Seul l’acteur ludique sollicitĂ© pourra Ă©valuer sur base de ses propres critĂšres s’il y a lĂ©gitimitĂ© ou pas.
A ce que j’ai pu constater, ceux-ci sont de plus en plus sollicitĂ©s… ce qui les poussent Ă mettre en place des partenariats.
Et de notre cotĂ©, ne pas recevoir une boĂźte ne nous empĂȘchera pas d’en parler. Il nous est dĂ©jĂ arrivĂ© de faire appel aux guests du blog ou d’emprunter une boĂźte (voire s’il le faut, le tester en salon pour en parler). Ou mĂȘme d’avoir une boĂźte en prĂȘt que nous avons fait passer Ă un autre reviewer ensuite.
Autre aspect chez DJUF, si on a reçu une boĂźte, le rĂ©dacteur peut conserver la boĂźte pour sa ludothĂšque personnelle. Ou le mettre pour la boĂźte Ă DJUF qui sert Ă nos animations. De temps en temps, on fait le nettoyage des vieux titres qu’on met en vente en occasion (Ă des petits prix), cet argent sert ensuite Ă couvrir les frais de site, cartes de visite et textiles (drapeaux – t-shirts – sweats). Mais clairement, ça ne couvre mĂȘme pas l’ensemble de ces frais. On vient d’ailleurs de mettre des liens d’achat sur notre site afin de faire rentrer un peu d’argent pour couvrir tout le matĂ©riel que nous investissons sur fonds propres.

Pour ma part, les prototypes KS que je reçois finissent ailleurs car je finis souvent par pledger le jeu. Par exemple, le Fuji Koro reçu pour la vidéo que nous avons réalisée est au bar à Jeux à Saint-Gilles et le Paris est parti chez un autre reviewer.
Les influenceurs
Je n’aime pas le terme influenceur… car pour moi, c’est synonyme d’avis biaisĂ©… la personne reçoit quelque chose pour en faire la promotion.
Allez voir sur Wikipédia, la définition est claire (ici).
Je ne me considĂšre pas comme un influenceur et si c’est comme ça que vous me voyez, alors il est temps que j’arrĂȘte d’Ă©crire.
Mon but n’est pas d’obtenir des boĂźtes gratos, mon but n’est pas de vous convaincre d’acheter un produit, mon but n’est pas d’avoir plus de followers qu’un autre pour avoir encore plus de boĂźtes gratos.
Je pense que se considérer comme un influenceur dans le jeu de société est toxique pour la beauté de notre passion, sa richesse et sa complexité.
Quel est le rĂŽle de quelqu’un qui Ă©crit sur les jeux Ă part d’Ă©crire sur les jeux ?
Si vous vous éloignez de ce but principal, vous faites fausse route.
Oui, il y a de nombreuses façons de parler de jeux et ça c’est bien. Par contre, il ne doit pas y avoir tant de raisons diffĂ©rentes.
Je vais ĂȘtre obligĂ© de parler de Kickstarter du coup… et des reviews… peut-ĂȘtre que certains ne le savent pas encore. Mais lors de campagnes Kickstarter, vous pouvez vous tourner vers des reviewers spĂ©cifiques. Et ces reviews spĂ©cifiques sont souvent payantes.
Alors oui, tout travail mĂ©rite salaire, lĂ je suis d’accord… alors qu’un reviewer qui a du matĂ©riel et est spĂ©cialisĂ© dans le sujet demande un dĂ©fraiement pour son travail, je valide.
Par contre quand les prix s’envolent Ă 500âŹ, 750⏠voir 1000⏅ j’avoue ne pas comprendre ce que l’on paie.
La qualitĂ© de la vidĂ©o peut-ĂȘtre. Non, je ne crois pas vu que certains reviewers gratuits vous feront un travail assez similaire.
Le nombre de personnes touchĂ©es par la-dite vidĂ©o ? Oui, c’est certain.
Mais oĂč est la critique alors… si je paie 1000âŹ, je ne m’attends pas Ă ce que mon jeu se fasse descendre. Si c’Ă©tait le cas, avouez que peu de personnes feraient appel Ă eux. 1000⏠pour avoir une critique nĂ©gative, un scandale đ Mais si l’avis ne sera pas nĂ©gatif Ă la fin, que toutes les vidĂ©os produites ont la mĂȘme valeur, alors oĂč est la critique lĂ -dedans ?!?
Ici, j’ai vraiment le sentiment d’ĂȘtre face au terme influenceur dont l’objectif sera de vous convaincre de pledger.
Ne faut-il pas se tourner vers des personnes qui vont faire ça de maniÚre naturelle, avec leurs moyens mais qui diront ce que le jeu a dans le ventre, qui pointe ce qui leur a plu et ce qui leur a déplu ?
J’en reviens Ă mon exemple de tantĂŽt avec les Recettes Ludiques, ne serait-ce pas çà que j’attends au fond…
Ne vaut-il pas mieux faire confiance Ă des passionnĂ©s qui le font encore par passion et qui n’attendent rien de tout ça.
Alors oui, il existe des structures professionnelles qui prĂ©sentent les jeux. Et qui sont payĂ©es pour le faire. Et avoir des professionnels, c’est bien. Mais pour moi, un avis ne doit pas ĂȘtre Ă©mis Ă la fin… On peut prĂ©senter le jeu, donner ses caractĂ©ristiques, parler des mĂ©caniques, mettre en avant certains points. Mais peut-on donner un avis sincĂšre alors que l’on a Ă©tĂ© payĂ© pour parler du jeu ? MĂȘme si dans 80% du temps, le jeu sera apprĂ©ciĂ©… il restera toujours des jeux qu’on apprĂ©cie moins, pour lesquels on voit moins l’intĂ©rĂȘt.
C’est par exemple pour ça que j’aime les Ludochronos de Ludovox qui ne font que prĂ©senter le jeu, son matĂ©riel, ses mĂ©caniques et ça dans un format court.

La concurrence
On m’a dĂ©jĂ demandĂ© si je n’avais pas peur de la concurrence et la rĂ©ponse est non… car je n’ai pas de concurrence.
Je ne suis qu’un passionnĂ© qui partage sa passion. J’ai la chance de le faire dans une chouette structure, avec une chouette Ă©quipe et avec du plaisir.
Donc, que quelqu’un ait plus de fans que nous n’est pas important. Que quelqu’un reçoive plus de jeux que nous, n’en parlons mĂȘme pas.
L’important, c’est de faire gagner le jeu. Et plus on en parle, mieux c’est.
Et chaque avis compte, chaque phrase compte, chaque mot compte.
Si toi aussi demain tu as envie d’Ă©crire, rejoins une structure (on est toujours ouvert chez DJUF d’ailleurs) ou lance la tienne.
Mais ne le fais pas pour la gloire, ou pour les boĂźtes gratuites, fais-le par passion.
Ca me rappelle d’ailleurs l’Ă©dition 2019 du Brussels Games Festival. Durant la soirĂ©e d’inauguration, nous avons fait un live accompagnĂ© d’autres structures ludiques et ça, c’est vraiment quelque chose qu’on apprĂ©cie de faire.

J’avoue, ça me donne envie de refaire ce genre d’expĂ©rience… (on avait d’ailleurs remis le couvert pour l’inauguration du Bar Ă jeux avec l’amie Girl Dot Games).
L’amour du jeu
AprĂšs cette tartine, il va falloir conclure…
Mais avant, sachez que mes propos de cet article ne sont qu’une rĂ©flexion personnelle sur ce que je fais, les activitĂ©s de Des Jeux Une Fois vues par moi et une vision de la situation actuelle du marchĂ© par rapport Ă la critique.
Et je respecterais tout Ă fait que vous ne soyez pas d’accord avec mon point de vue. N’hĂ©sitez d’ailleurs pas Ă donne votre avis (en restant polis et courtois :p).
En rĂ©sumĂ©, une critique a plus de poids si elle est dĂ©sintĂ©ressĂ©e. Le meilleur avis au final, c’est peut-ĂȘtre le joueur qui va vous dire pourquoi il a aimĂ© ou pas un jeu. Avec des mots simples.
L’obtention d’une boĂźte ne doit pas ĂȘtre la condition systĂ©matique Ă une critique. Pensez aux petites structures, elles mĂ©ritent aussi de la visibilitĂ©. Testez des jeux sur salon ou dans des soirĂ©es jeux.
N’hĂ©sitez pas Ă demander conseil Ă vos boutiques, moi j’en connais des supers qui vous conseilleront au mieux ce qui est fait pour vous et qui laisseront le chiffre d’affaire passer aprĂšs votre satisfaction. Un client satisfait revient toujours Ă son boutiquier prĂ©fĂ©rĂ©. J’en profite pour saluer Patrick de DĂ©dale qui m’a dĂ©jĂ fait changer d’avis sur des choix ou m’a fait faire de belles dĂ©couvertes.
En rĂ©sumĂ©, je ne me vois pas comme un influenceur, et j’espĂšre que vous ne me verrez pas comme ça aprĂšs la lecture de tout ça. MĂȘme si au fond, ce que j’Ă©cris aura probablement une forme d’influence…
Et je ne sais pas si je suis lĂ©gitime Ă demander une boĂźte (ou si DJUF l’est), c’est aux acteurs de dĂ©cider de cela et je ne tiendrais jamais rigueur Ă aucun d’entre eux s’ils ne veulent (ou ne peuvent) pas en donner. Mais je prendrai le temps nĂ©cessaire Ă Ă©valuer un titre et je ferai de mon mieux si j’en parle pour que le joueur sache s’il est fait pour lui.
Pour ma part, je continuerais toujours Ă privilĂ©gier la critique positive et de parler de jeux que j’aime… il y a suffisamment de bons jeux pour ne pas devoir perdre son temps Ă dĂ©truire un jeu qui ne m’a pas plu.
Et n’oubliez pas, derriĂšre chaque boĂźte de jeu, il y a des personnes : auteurs, illustrateurs, graphistes, Ă©diteurs, playtesteurs, distributeurs, boutiquiers… des heures et des heures de travail.
Je tiens donc Ă saluer tous les gens qui font des jeux et tous ceux qui en parlent une fois.
Et surtout, mĂȘme si au fond, c’est un business… n’oublions pas que nous sommes lĂ pour nous amuser ou amuser les autres.
Cowmic
Commentaires
Bonjour ! J’ai trouvĂ© ce tĂ©moignage hyper intĂ©ressant. Pourtant, j’ai trouvĂ© certains points peu clairs. Par exemple, ta position sur les critiques dites nĂ©gatives. Si une critique nĂ©gative est suffisamment argumentĂ©e et n’a pas pour but de simplement descendre le jeu, est-ce une bonne ou une mauvaise chose ? Pq y’en a-t-il pas plus selon toi ? Est-ce qu’on peut faire une critique nĂ©gative d’un jeu que l’on a reçu gratuitement sans craindre une rĂ©action nĂ©gative de la part de l’Ă©diteur (comme ne plus jamais voir ses critiques relayĂ©es par cet Ă©diteur ou ne plus recevoir de boites). Concernant les boites gratuites j’aimerais aussi savoir si c’est une nĂ©cessitĂ© pour l’existence de cette page ou non ? Est-ce, sans ces boites, tu pourrais suffisamment l’alimenter pour que cela soit intĂ©ressant. J’aimerais aussi que tu rĂ©agisses sur le possible risque d’un biais « de gratitude » que tu pourrais avoir envers un Ă©diteur qui t’envoie un jeu… Enfin, je voudrais revenir sur l’une des derniĂšres phrases de ce billet qui dit en substance de ne pas oublier tous les acteurs qui ont travaillĂ©s sur le jeu ? Qu’est-ce que sous-entend exactement ? Qu’il faut ne pas ĂȘtre trop violent de ces critiques ? Quel niveau d’indulgence cela implique et comment cela se traduit-il dans tes critiques ?
Bonjour,
Avec les rĂ©actions, je me rends compte que l’article est loin d’ĂȘtre assez complet (en Ă©tant dĂ©jĂ trop long :p).
Alors pour la critique nĂ©gative, c’est pas mon truc. Prends le temps d’Ă©crire sur un article pour dire qu’il n’est pas bien, ça me branche pas. Par contre, une argumentation nĂ©gative ne me pose aucun soucis. Tant que c’est fait avec respect, je n’ai rien contre (au contraire si ça mets en avant un dĂ©faut ou quelque chose qui ne va pas me plaire).
Alors, je me mets Ă la place de l’Ă©diteur qui a donnĂ© une boĂźte qui reçoit une critique nĂ©gative… effectivement, ça ne doit pas faire plaisir. NĂ©anmoins, je me nourrirais de celle-ci. Et si je ne suis pas d’accord, je dĂ©fendrais moins point de vue. AprĂšs, je respecterais un avis fait sur base d’un retour personnel… Le gars a pas aimĂ© le jeu, c’est normal, un jeu ne peut pas plaire Ă tous. Et si il a bien dĂ©crit le produit, l’avis nĂ©gatif (si il est justifiĂ©) servira Ă d’autre et pourra mĂȘme en convaincre certain.
Concernant les boĂźtes gratuites, je pense qu’il y a moyen de faire sans… et je pense d’ailleurs que certain le font… mais il faudra prendre plus de temps pour les tests (aller dans des lieux le permettant de jouer, des festivals, des ludothĂšques) et le plus dĂ©licat sera toujours les illustrations d’articles (les photos) et le nombre de partie pour donner un avis sur de l’expĂ©rimentation du jeu. Comme dit, perso, je me sens toujours plus lĂ©gitime d’Ă©crire que quelque chose que j’ai achetĂ© (mais je pense que ça vient de ma personnalitĂ©).
L’effet gratitude, je n’aime pas… il est toujours clairement prĂ©cisĂ© Ă l’Ă©diteur que si un jeu ne plait pas, nous n’en parlerons pas pour faire plaisir. Par contre, j’avoue souvent mettre le cotĂ© humain de certaine maison d’Ă©dition car pour moi, c’est important.
Le fait de ne pas oublier les acteurs, je veux surtout dire que si des gens ont travaillĂ©s dessus et l’on fait correctement, il mĂ©rite plus qu’un : « j’ai pas aimé » ou « c’est de la merde ». Justifier des propos et ne pas oublier qu’on parle d’un produit qui ne se mets gĂ©nĂ©ralement pas dans une boĂźte sans travail.
Je te remercie pour tes questions, elles ont encore plus poussé ma réflexion.
Merci pour tes réponses. Elles sont trÚs éclairantes et mettent bien en valeur la sincérité de ta démarche !