Shackleton Base : a Journey to the Moon
Après les zombies et la Nature (Verdant, Living Forest, Cascadia, Earth, Harmonies, …), j’ai l’impression que le thème de l’espace a la cote dans le monde ludique ces derniers temps (Starship Captain, Evacuation, Starship Interstellar, From the Moon, …) . Avec souvent une approche plus réaliste, moins « space opera » qu’avant. Shakleton Base : a Journey to the Moon se situe pile dans cette mouvance, en nous plongeant à la tête d’une agence spatiale qui cherche à établir une base permanente sur la Lune. Et pour ça, il faudra composer avec trois corporations privées, chacune avec leur propre agenda. Quand je vous disais que l’approche était réaliste. 😉
Si vous voulez savoir si vous êtes fait pour établir la première base permanente sur la Lune, je vous expose les grands principes dans Shackleton Base en quelques lignes ci dessous, avant de vous livrer mon avis sur le jeu.
Principes de Shackleton Base
Shackleton Base est un jeu de pose d’ouvriers modulaire. Au cours de chaque partie, trois modules de corporation parmi sept disponibles seront en jeu. Chacun de ses modules amène ses propres ressources, actions, cartes projets et objectifs et introduit de nouveaux axes de développement possibles. La combinaison de ces différents modules (parmi 35 possibles) offre une grande diversité de jeu dès la mise en place !
Pour l’histoire, le nom du jeu provient du nom d’un cratère situé au pôle Sud de la Lune, et désigné par la NASA comme un site potentiel pour l’établissement d’une présence humaine permanente sur la Lune (source Wikipedia).
Une manche de Shackleton Base
Une partie de Shackleton Base se joue en trois manches. Chaque manche est divisées en trois phases : la phase de navette, la phase d’action et la phase de maintenance.
1) Phase de navette
Au début de chaque manche, les joueurs vont sélectionner une des tuiles navettes disponibles, dans l’ordre inverse du tour. Chaque navette contient un certain nombre de ressources (crédits, titanium et/ou terre rare), et six astronautes répartis en trois catégories : ingénieurs (jaune), techniciens (rouge) et scientifiques (bleu).
L’ordre du tour est ensuite mis à jour en fonction du numéro de la navette sélectionnée, du plus petit au plus grand.
Pendant la phase d’action, les joueurs vont déployer chacun à leur tour leurs astronautes un par un pour effectuer des actions. Le actions possibles sont de trois types.
2) Phase d’action
a) Exploiter le cratère
Pour exploiter le cratère, le joueur envoie un de ses astronautes sur un des emplacements libres en bordure du plateau central. Cela active tous les secteurs qui contiennent au moins une structure alimentée sur la rangée correspondant à cet emplacement.. Si le secteur contient au moins une de ses propres structures, son activation est gratuite. Sinon, il doit payer un certain nombre de crédits (déterminé par l’emplacement de son astronaute) au joueur qui possède la plus grande structure du secteur. L’activation est obligatoire, il n’est pas possible de « sauter »un secteur pour éviter de payer.
En fonction du type d’astronaute utilisé pour cette action, le joueur récolte différents types de ressources de chaque secteur activé. Un ingénieur rapporte les ressources illustrées au centre de chaque secteur activé (titanium ou terre rare). Un technicien rapporte 3 crédits par secteur activé. Et un scientifique active un des jetons corporations de chaque secteur activé. Les effets de ces jetons dépendent des modules de corporation en jeu.
b) Effectuer une action de commandement
i. Construire une structure
Le joueur peut envoyer n’importe quel astronaute sur un des emplacements du plateau central correspondant à une des trois actions de commandements. Si l’emplacement comporte un coût en crédits, celui-ci doit être payé avant de pouvoir exécuter l’action.
En payant le coût correspondant en titane, terre rare et crédit, le joueur peut déployer une nouvelle structure depuis son plateau sur un secteur alimenté du cratère. Chaque cratère ne peut contenir qu’une seule structure de chaque joueur et de chaque taille. En construisant une structure, on libère de nouveaux espaces permettant d’accueillir des astronautes sur son plateau personnel. Une fois occupés, ces emplacements vont procurer différents avantages (revenus, réductions de coûts, points de victoire, etc).
Si l’astronaute envoyé pour exécuter cette action est un ingénieur, on obtient un bonus. Le bonus consiste à pouvoir placer et activer un nouveau jeton de corporation autour du secteur où on vient de construire.
ii. Financer un projet
Financer un projet consiste à acheter une des cartes projets liée à une des corporations en jeu. Ces cartes ont un coût en crédits et en énergie, ainsi qu’un pré requis en énergie. Les coûts et pré requis augmentent au fur et à mesure du déploiement des jetons de cette corporation.
Chaque carte est unique et peut apporter un bénéfice direct, une nouvelle action, des points de victoire, etc.
Si l’astronaute utilisé est un technicien, on obtient une action de corporation en bonus (voir ci-dessous).
iii. Effectuer jusqu’à trois actions de corporations
Les actions de corporations sont symbolisés par une icônes d’engrenage bleu et peuvent être trouvée à différents endroits du jeu : sur la piste de réputation du plateau central, sur les plateaux des corporations en jeu, ou encore sur les cartes projets qu’on a achetée. Ces actions sont spécifiques aux corporations et aux cartes utilisées pendant la partie.
Si l’astronaute utilisé est un scientifique, on peut rapatrier un des astronautes présent sur le plateau central (le portail lunaire) dans sa base.
c. Visiter le portail lunaire
Cette action permet d’envoyer un de ses astronautes sur l’emplacement du portail lunaire sur le plateau central. On reçoit en échange trois crédits, une action de corporation et un autre astronaute du portail qu’on rapatrie dans un des emplacements disponibles de sa base.
d. Revendiquer des objectifs de corporations
A la fin de son tour, un joueur peut revendiquer un ou plusieurs objectifs de corporation si il atteint les conditions de ces objectifs. Cependant, le nombre de places pour chaque objectif est limité, et chaque joueur ne peut revendiquer qu’un seul objectif de chaque corporation.
3. Phase de maintenance
Lors de la phase de maintenance, les joueurs vont récupérer les astronautes placés autour du cratère lors la phase d’action pour les placer dans leur base, générer des revenus et payer les coûts de maintenance de leurs installations.
Fin de partie et scoring
La partie se termine après la phase de maintenance de la 3e manche.
Aux points de victoire accumulés pendant la partie, chaque joueur additionne
- les points des cartes projets qu’il a achetées ;
- les points acquis grâce le remplissage des laboratoires de son base par des astronautes ;
- un nombre de points de victoire égal à sa réputation ;
- les points de victoire liés aux corporations en jeu.
Le joueur avec le total de points de victoire le plus important gagne la partie.
Mon verdict
Un jeu de pose d’ouvriers…
Au premier abord, Shackleton Base semble être un jeu de pose d’ouvriers assez classique. Mais grâce à l’assemblage judicieux de petits ajustements mécaniques, je le trouve à la fois original, très interactif et doté d’une grande rejouabilité.
Le simple choix des navettes au début de chaque manche offre déjà un dilemme intéressant. Car ce choix va non seulement conditionner les ressources reçues et l’ordre du tour pour la manche. Mais surtout la répartition des astronautes entre les 3 types. Certes on peut utiliser ses astronautes sans tenir compte de leur type pour les actions de commandement, de sorte qu’il est peu probable d’être totalement bloqué. Mais les bonus accordés si on utilise le type d’astronaute associé à l’action choisie donnent des avantages significatifs à ceux qui planifient leurs besoins avec soin.
… mais pas que
Shackleton Base est également un jeu de construction de moteur, au travers de la construction de ses structures. Le placement de ces dernières est crucial pour optimiser la récolte des ressources au moindre coût. Comme chaque secteur ne peut accueillir qu’un module de chaque taille, il y a une véritable pression sur les emplacements.
D’autant plus que le développement sur le plateau central se double d’un contrôle de majorité, au travers de la récupération des astronautes en fin de manche. Cette phase est une des sources principales permettant de remplir sa base et d’obtenir les bonus liés à cette occupation. Mais les astronautes de chaque rangée reviennent uniquement au joueur qui contrôle le plus de structures dans cette rangée. Il est donc essentiel de placer judicieusement ses structures pour optimiser ses récoltes, tout en évitant de favoriser les autres joueurs.
Les corporations
Chaque corporation amène ses propres mécaniques au jeu de base. Certaines vous demanderont d’accueillir des touristes spatiaux dans votre base, d’autres de construites des structures communes, de collaborer pour éviter un impact d’astéroïde ou encore de démonter vos structures lunaires pour les envoyer sur Mars.
Ces modules introduisent de nouveaux choix stratégiques : faut-il se spécialiser dans la collaboration avec une corporation en particulier ou adopter une approche plus équilibrée ? Et ces choix dépendront des modules en jeu, de la disposition du plateau central, des choix des autres joueurs… Il faudra s’adapter à chaque nouvelle partie, pas question de suivre une stratégie scriptée dans Shackleton Base ! Vu que les objectifs, les projets et certaines actions liées aux corporations sont une source importante de points de victoire, on ne pourra en tous cas pas les négliger !
Le système des actions de corporations permet d’intégrer ces modules de façon complètement naturelle au jeu. Les cartes projets, les actions, et les objectifs associés enrichissent le gameplay tout en restant parfaitement intégrés au cœur du jeu. Je trouve ce système extrêmement bien pensé. Et je ne serais pas étonné de voir apparaître des extensions sous la forme de nouveaux modules de corporations. Il en existe d’ailleurs déjà, créés par des fans de la première heure.
Le matériel
Franchement, je salue la qualité de l’édition de Shackleton Base. Les plateaux sont clairs, avec une iconographie pratique qui rappelle toutes les informations importantes en cours de partie, évitant ainsi les allers-retours dans les règles. Les punchboards sont épais et solides, le plateau joueur est double couche et maintient tout bien en place. Et les astronautes, joliment imprimés, ajoutent une immersion bienvenue !
Le jeu est livré dans une série de boîtes en carton, dont une (ou deux) par module de corporation. Cela facilite vraiment le rangement et la mise en place. Il est facile d’identifier et de sortir uniquement le matériel lié aux modules choisis pour la partie. Au moment de ranger, chaque boîte est illustrée avec un rappel de son contenu pour éviter d’oublier quoi que ce soit.
Le mot de la fin
Shackleton Base : a Journey to the Moon a vraiment été une belle surprise pour moi. Tout dans ce jeu me séduit : un matériel beau et sobre, des règles limpides servies par une iconographie et des rappels omniprésents, et des parties variées riches en interactions entre joueurs. Il s’est rapidement fait une place de choix à notre table de jeu en cette fin d’année !
Fiche technique
Conception: Fabio Lopiano, Nestore Mangone
Illustration: David Sitbon
Édition: Sorry We Are French
Joueurs: 1-4
Age:14+
Durée: 60-120 minutes
Jeu offert par Sorry We Are French, merci ! Nous restons libres du contenu.