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Discussion ludique autour d’un café avec Théo Rivière

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Salut chèr.e ludiste,
A l’heure où je t’écris, je reviens de Bruxelles après avoir tapé la causette avec Théo Rivière.

Résumé de l’épisode précédent

Il y a plus de deux ans de ça, Jon de l’équipe avait adoré jouer à The Loop dont Théo est le coauteur. En écrivant son article, il m’avait demandé si on pouvait mettre The Loop en tant que coup de cœur et jeu belge. Je lui ai demandé pourquoi. Il me répond que Théo habite Bruxelles et il est donc un peu Belge, une fois ! Je me suis donc dit, avant de se la faire appropriation culture, il valait mieux demander l’avis de Théo !

Quelques beaucoup de mois plus tard, je vois une publication de Théo sur Facebook qui vendait des jeux de société. J’en ai donc profité pour lui demander s’il était d’accord qu’on se voit pour parler de ses projets ludiques. PS: le jeu que je voulais a été réservé par quelqu’un d’autre mais j’avais le plus important : The Auteur !

A coffee in Brussels (ça ferait bien pour le prochain Woody Allen)

Théo m’a donc donné rendez-vous au café de la Capitale ce mardi 07 février à 10h30. Etant donné que je devais déposer les enfants et les chercher après, c’était la meilleure plage pour se voir.  Lorsque j’arrive dans le café, 30 minutes avant le rendez-vous, ma première question pour lui est tout de suite apparue : pourquoi avoir choisi ce café ? En effet, si tu ne connais pas le café, c’est un endroit où on sert du bon café, avec une chouette ambiance « chill » et pas trop loin du commissariat. Tu te dis : pourquoi mentionner la proximité avec le commissariat ? Car Théo ne me connaît pas en vrai. Il se peut que je sois un fan fou qui veut l’enlever pour qu’il créé plein de jeux rien qu’à moi. Crier au secours avec la police à côté ne serait que le résultat d’une bonne analyse de risques…

Je lui ai donc posé la question et il a bien rigolé. La vraie raison est qu’il aime bien ce café et que ce n’est pas loin de là où il habite (si tu veux savoir où il habite, tape « UN »). J’arrête donc mon délire narratif. Passons maintenant à notre entretien, une fois !

Salut Théo, merci de m’avoir accordé du temps pour un article pour Des Jeux Une Fois. Tout d’abord, connais-tu Des Jeux Une fois ?

Oui je connais bien le site. J’ai rencontré Mic lors d’une Festival Jeux De Nim et je lis certains de vos articles. Je trouve ça cool que vous chroniquiez des articles pour les enfants.

Comment as-tu atterri à Bruxelles, comptes-tu y rester ?

Je suis arrivé à Bruxelles pour deux raisons. Tout d’abord j’avais envie de visiter la région avec Elodie, ma compagne et puis j’ai reçu une offre d’emploi de Repos Prod. J’ai donc saisi l’occasion car je suis fan de la vie à Bruxelles. Même après avoir quitté Repos Prod, il y a déjà 5 ans, je n’envisage actuellement pas de quitter Bruxelles. Elodie et moi sommes vraiment bien installés.

Te considères-tu comme Belge ?

Un petit peu car j’ai acquis pas mal d’habitudes et d’expressions mais il y a tout de même un chemin à parcourir.

Es-tu d’accord que Des Jeux Une Fois te réfère comme un auteur belge, vu que à nos yeux, tu es Belge d’adoption ?

Il n’y a vraiment aucun souci et c’est chouette d’entendre ça.

Tu fais partie, avec Antoine Bauza, Ludovic Maublanc et Corentin Lebrat, de laTeam Kaedama. Comment est né ce beau projet et où ça en est ?

Team Kaedama dont fait partie Théo Rivière
Team Kaedama avec de gauche à droite : Ludovic Maublanc, Antoine Bauzat, Théo Rivière et Corentin Lebrat

Nous sommes un groupe de bons potes qui discutent pas mal sur Facebook. Nous partagions nos expériences positives et moins bonnes en tant qu’auteur. En 2018, suite à mon départ de Repos Prod, j’ai pas mal discuté avec les autres car je voulais devenir indépendant-développeur mais ça m’inquiétait. Antoine a proposé qu’on monte une boite tous les 4 et 6 mois plus, on a fondé Team Kaedama.

Quant aux projets en cours, on a d’abord Fairy Tale qui va sortir chez Don’t Panic Games. Il y a ensuite 𝘿𝙚𝙖𝙙 𝘾𝙚𝙡𝙡𝙨 : 𝙏𝙝𝙚 𝙍𝙤𝙜𝙪𝙚-𝙇𝙞𝙩𝙚 𝘽𝙤𝙖𝙧𝙙 𝙂𝙖𝙢𝙚, notre Kickstarter qui sera lancé prochainement qui est édité par Scorpion Masqué.

On a aussi un projet secret mais je ne peux rien dire pour l’instant. Désolé. Par contre Chateau Aventure, Vol 2 sortira prochainement chez Iello.

Dans ta ludographie, il y a des jeux que tu as cocréés avec d’autres autrices ou auteurs. Comment se déroule l’approche de la cocréation ? Quelqu’un t’approche avec une idée ou inversement ou bien vous vous mettez d’accord de base pour faire un projet commun ?

Pour Rauha que j’ai cocréé avec Johannes Goupy. On s’était rencontré à Cannes et j’avais bien aimé son jeu Queenz, qu’il avait cocréé avec Bruno Cathala. On s’est bien entendu et on a décidé de faire un jeu ensemble.

Quant à Bag of Chips, Mathieu Aubert est un très bon pote et nous voulions faire un truc ensemble.

Par contre c’était différent pour la Maison des Souris que j’ai créée avec Elodie Clément. Je revenais de FIJ Cannes 2018 et Perlatette m’avait donné envie de faire un jeu construit autour d’une histoire et avec du super beau matériel. Lorsque j’ai fait mon premier proto, je l’ai trouvé nul. Elodie m’a dit le contraire mais qu’il fallait le travailler. A force de tests et de conseils de sa part, il était évident qu’Elodie devait être coautrice de la Maison des Souris.

Quels sont tes futurs projets ludiques ?

Il y a d’abord Fucking Dilemme que j’ai cocréé avec Corentin Lebrat. Il sera édité par Lumberjacks Studio. C’est un jeu d’ambiance du style de Blanc Manger Coco mais sans trop virer dans le trash.

Il y a ensuite Fluffy Valley avec Maxime Rambourg, avec qui j’avais déjà cocréé The Loop. C’est un placement d’ouvriers coopératif dans le thème des chiens de prairies. Il sortira chez Loki en automne de cette année. Ce que j’aime beaucoup dans la cocréation, c’est que l’autre nous pousse vers les sentiers qu’on n’aurait pas explorés seul. Dans ce cas-ci, Maxime me pousse plus vers des jeux plus gamers tandis que moi, vers des jeux plus pour les enfants. C’est donc une expérience vraiment enrichissante.

Le dernier que je peux te citer, c’est Nautilus Island, co-signé avec Johannes Goupy, qui est un jeu collection qui sortira chez FunnyFox.

Par curiosité, quelle est ton approche pour créer un jeu ? Tu commences par la mécanique et tu colles un thème dessus ou inversément ?

Le point de départ peut être différent : le matériel que j’ai envie de développer, une histoire à raconter voire même une sensation. Pour Sticky Chameleons, c’était cette sensation de main collante. Dès que j’ai une idée, j’essaie de faire un proto et puis de l’améliorer.

On dit par ailleurs qu’il y a deux écoles pour créer un jeu. Soit on matérialise rapidement le jeu qu’on veut créer et on le peaufine. Soit on prend beaucoup de temps pour conceptualiser le jeu, travailler sur la mécanique avant de passer à la matérialisation.

Je suis plutôt de la première école. Je prends d’ailleurs beaucoup de temps pour concevoir la boîte, les illustrations qui iront dessus et surtout le rangement à l’intérieur. La Maison des Souris en est un exemple.

J’ai récemment participé à un échange autour de la place de la femme dans le monde ludique. Il a été animé par Girl Dot Game et j’en ai fait un article car je suis très sensibilisé sur ce sujet. J’aimerais donc avoir ton point de vue.

Je salue d’abord cette initiative car les influenceuses comme Girl Dot Game donnent à la femme une position forte dans le monde du jeu. Elles attribuent un rôle positif aux actrices ludiques et sont un symbole pour lutter contre ces inégalités. Elles cassent aussi les clichés en jouant à des jeux experts.

Je suis donc très sensible à cette problématique. Je peux te citer de tête 50 auteurs qui ont été édités mais malheureusement, pas 50 autrices, surtout si tu exclues les autrices des jeux pour enfants. Il n’y a pas de raison manifeste propre au milieu pour expliquer cette problématique.

Le problème est plus profond et est lié au patriarcat qui se ressent d’autant plus dans les métiers créatifs. Je sais cependant que le milieu ludique a pris conscience de cette inégalité et fait un effort pour améliorer ça.

On le voit d’abord par le visuel où on ne tombe pas systématiquement sur une boîte de jeu avec une femme sexy. Il y a aussi plus de personnages féminins dans les jeux. Quant au langage, il est plus ouvert et inclusif : on trouve plus de « il ou elle » dans les règles de jeux.

Cependant je suis conscient que ça ne va pas changer rapidement et que c’est ancré dans les mentalités. On peut même parler de réflexe inacceptable. Par exemple dans les festivals, je vois encore des joueurs, après avoir reçu l’explication, demander aux joueuses : « tu as tout compris? ».

Néanmoins, on ne peut plus dire qu’on ne sait pas. La discrimination sexuelle, culturelle ou l’esclavagisme ont bien existés. Il faut concevoir des jeux en prenant conscience de cela, en respectant l’histoire d’autrui quand on utilise un thème. Tendre finalement à plus d’inclusivité.

Merci Théo pour ton temps. J’aurais cependant une dernière question : as-tu encore autant envie de jouer ?

A mort ! Je joue beaucoup mais moins dans le cadre de soirées jeux. Je joue tous les jours avec Elodie, ma campagne et c’est génial.

Beaucoup de joueurs, qui veulent créer des jeux, craignent que cela va changer leur envie de jouer. Ce n’est pas le cas pour moi en tout cas !

Mot de la fin

Ce fut un vrai plaisir de discuter avec Théo Rivière ! On a aussi abordé d’autres sujets comme l’amélioration de la qualité des jeux franchisés, du non-sense des jeux avec des grosses boites remplies par du vide ou le fait que certains jeux sortent plus tard dans les boutiques belges (le cas de Rauha en est un exemple).

Quand les rêves deviennent réalité

Pour conclure, je dois t’avouer, chère lectrice, cher lecteur, que c’est vraiment génial de rencontrer les gens qu’on admire et d’échanger avec eux. Ma première rencontre fut avec Etienne Espreman, dont le jeux Bruxelles 1893 a fait naître en moi cette passion du jeu. Je l’avais rencontré dans le Salon du Livre et de la BD, autour d’un Not Alone qu’il éditait avec Geek Attitude Games. Il y a ensuite eu Sébastien Dujardin autour d’un Frutopia. Il allait y jouer lors du Festival de Nim avec sa famille et je me suis incrusté. J’ai bien perdu mais c’était chouette de le rencontrer.

Récemment c’est Girl Dot Game autour d’un échange sur la place de la femme sur le monde ludique. J’adore ce qu’elle fait et comme dit Théo, elle donne vraiment un rôle positif à l’actrice ludique.

Selfie avec Théo Rivière
Petit selfie avant de nous quitter

Quant à Théo, j’adore ses jeux (Cosmic Race et Flyin’Goblin en sont des exemples) et apprécie beaucoup sa présence dans la scène ludique. C’était un vrai plaisir de discuter avec lui autour d’un café et j’ai hâte de le revoir autour d’un jeu !

PS : Son premier jeu de rôle, The Heist, est en financement participatif sur Game on TableTop. Si tu es amatrice.eur de jeu de rôle et de l’univers de Ocean’s Eleven, ne traine pas trop car la campagne se termine le 31 mars 2023 !

Premier jeu de rôle de Théo Rivière

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