La gloire de Rome
Il y a des jeux qui ne paient pas de mine. Une boite assez petite, discrète, et juste un titre « La gloire de Rome » écrit dessus, accompagné d’un dessin.
C’est cette petite boite qui renferme un jeu plein de finesse et de choix cornéliens que je veux mettre aujourd’hui en avant, dans un coup de cœur, une fois.
Le concept
Nous sommes en 64 avant JC, Néron a brûlé Rome et tout est à reconstruire. C’est donc l’occasion pour vous de briller aux yeux de l’empereur et de faire fortune en rebâtissant Rome.
Vous allez devoir utiliser vos relations, vos experts et vos ressources pour être le premier à rétablir la gloire de Rome.
La gloire de Rome se joue avec des cartes qui auront 3 utilités possibles : utilisées comme une ressource, comme un expert ou comme un bâtiment.
Toutes les cartes vont se poser selon leur utilisation autour d’une fiche joueur, assez bien faite car elle permet aussi de bien nous rappeler les options possibles de jeu.
Et c’est vraiment le bienvenu, car si je jeu ne paie pas de mine, je vous promets que l’expliquer n’est pas une mince affaire. Mais je vais tenter de vous faire un tour d’horizon assez complet quand même.
Le but du jeu sera donc d’être à la fin de la partie le joueur avec le plus de points d’influence. Ces points sont obtenus en construisant des bâtiments, en cumulant des matériaux dans sa chambre forte, ou via des effets de bâtiments.
Le déroulement de la partie
Chacun à son tour, un joueur va être le chef.
Le chef va décider de « penser« , donc piocher des cartes, ou de « mener un rôle« .
Mener un rôle, c’est jouer une carte en tant qu’expert (nous allons revenir sur les rôles plus tard). Dans ce cas, chaque autre joueur pourra suivre ou « penser ». Suivre, c’est bien entendu jouer un expert identique au chef.
Si le chef joue un architecte, les autres joueurs pourront donc jouer aussi un architecte, même si cet architecte n’est pas lié au même bâtiment, bien sûr.
Dès que tous les joueurs ont choisi de suivre ou de penser, on jouera l’action de l’expert à tour de rôle, en commençant par le chef. Il se pourrait donc que si on calcule mal, on se retrouve à ne pas savoir faire l’action ou plutôt à ne pas pouvoir faire exactement ce qu’on a voulu faire au départ. C’est surtout le cas pour les rôles pouvant nous procurer des matériaux, par exemple.
Si vous voulez suivre, ou mener un rôle, mais que vous n’avez pas en main la carte du bon expert, vous pouvez toujours faire une « pétition » c’est à dire, utiliser 2 cartes de même couleur. Ou d’utiliser une carte « sénateur » qui est une sorte de joker.
Lorsque tous les joueurs ont joué, les cartes (hormis les sénateurs) seront placées dans un lot commun, elles serviront pour certaines actions.
Ensuite le chef passe son pion au joueur de gauche et on continue.
Les différents rôles
Carte mauve, le patron
Jouer le rôle « patron » permet de prendre une carte du lot commun et de la glisser parmi sa clientèle (gauche de votre plateau) en laissant apparaître le nom de l’expert, écrit sur la gauche de la carte. Tous ces clients vont vous permettre de faire plusieurs fois l’action des rôles si vous menez ou vous suivez. Et ce bien sûr uniquement si vous avez dans votre clientèle le rôle joué par le chef.
Vous ne pourrez pas avoir plus de clients que de points d’influence.
Carte jaune, l’ouvrier
Jouer le rôle « ouvrier » permet de prendre une carte du pot commun et de la glisser dans le bas de son plateau (stocks), en laissant ainsi apparaître le matériel ainsi obtenu.
Attention, quand vous suivez l’action ouvrier, d’être sur de pouvoir prendre un matériel. N’oubliez pas que les cartes jouées par les adversaires ne vont dans le pot commun qu’une fois que tout le monde a exécuté son action.
Carte bleue, marchand
Jouer le rôle de « marchand » permet de prendre une des cartes de notre stock et de la placer sur la droite de notre plateau, dans notre chambre forte (face cachée). La valeur indiquée sur la carte compte comme points de victoire en fin de partie.
Vous ne pourrez pas avoir plus de marchandises que de points d’influence.
Carte rouge, légionnaire
Jouer le rôle de « légionnaire » permet d’exiger des matériaux à vos voisins (joueurs directement à votre gauche et à votre droite). Pour ce faire, prenez la carte « Rome exige » et placez cette carte sur une de celles que vous avez en main, ne dévoilant ainsi que le matériel qui fait l’objet de votre demande.
Ensuite montrez à tous les joueurs le matériel demandé en disant « Rome exige … » le matériel ainsi exigé.
Chaque voisin devra alors vous donner une carte de la couleur demandée si il en possède au moins une, et à vous de la placer dans vos stocks (en bas de votre plateau). Si un voisin n’a pas de carte de cette couleur, il devra dire « Gloire à Rome« pour ainsi montrer sa dévotion malgré tout.
Vous pourrez aussi prendre une carte du pot commun, si elle correspond à votre exigence.
A la fin, vous reprendrez dans votre main la carte qui vous a servi à montrer votre exigence.
Attention, vous aurez bien compris là que vous ne pouvez pas exiger une ressource que vous n’avez pas en main.
Carte brune, artisan
Jouer le rôle d’artisan est une action centrale au jeu, car c’est cette action qui permet de bâtir.
Vous pouvez donc jouer une carte bâtiment de votre main et la placer sur une carte « fondation » de la même couleur. Ces cartes n’étant pas infinies, il faut mesurer que vous ayez l’emplacement pour votre bâtiment.
Vous pourrez ensuite placer un matériel de votre stock sur un chantier. Vous pouvez d’ailleurs faire cette action directement si vous n’avez pas envie de commencer un chantier mais de continuer un chantier.
Un bâtiment sera terminé si il contient autant de matériaux que son niveau de construction. Une fois le bâtiment terminé, vous pouvez le placer du côté des bâtiments construits et profiter de son effet, défausser les matériaux et placer la fondation sur le haut de votre plateau, laissant afficher le niveau de la construction (pièces) qui viendra s’ajouter à vos points d’influence. Notons qu’il s’agit ici d’un bon moyen de marquer des points de victoire aussi.
Carte grise, architecte
Un architecte fait la même chose qu’un artisan, si ce n’est qu’il permet d’exploiter les cartes de notre main comme matériel et non de notre stock.
Mon avis
La gloire de Rome est un jeu vraiment complet, et il rassemble des éléments que j’adore dans les jeux de société stratégiques. Et ce pour un prix modique car le prix est de 20€ environ (selon les boutiques).
Choix et interactions
D’abord nous avons des choix cruels mais stratégiques à faire. Chaque carte pouvant être à la fois un rôle, un bâtiment ou un matériel, il nous faut choisir. Et pour construire des bâtiments avec des effets vraiment terribles, il va falloir défausser et renoncer à d’autres bâtiments tout aussi intéressants.
Nous avons aussi une interaction puissante entre les joueurs. Grâce aux légionnaires, bien sûr, mais aussi avec l’arrivée des ressources, l’opportunisme de suivre des rôles ou le calcul de ne pas offrir l’opportunité à un joueur d’enchaîner les rôles grâce à sa clientèle.
Vraiment c’est le genre de jeu durant lequel on doit toujours regarder ce que les autres font et s’en méfier.
Cette tension est vraiment quelque chose qui me tient quand je joue à ce jeu.
Les effets de certaines cartes peuvent vraiment être décisifs et renverser le jeu. Cela joue vraiment sur la tension de jeu, il ne faut rien lâcher, il faut tenir bon.
La carte qu’il faut jouer le plus intelligemment c’est les catacombes, qui mettent fin immédiatement à la partie.
Une ergonomie belle et efficace
La façon d’organiser son plateau joueur est vraiment bien pensée. Même si c’est un peu dommage qu’il faille chaque fois glisser sous le plateau ses cartes, c’est une main à prendre, car si on respecte bien la façon de poser ses cartes, c’est vraiment clair, bien pensé et intelligent. On sent que l’auteur a vraiment bien mis au point son système.
Graphiquement, les illustrations sont simples, mais efficaces. J’aime bien le style des dessins, et l’ambiance BD qu’elle apporte.
Un jeu intelligent
Avec le recul, et mon expérience de 6 ans de latin en secondaire, j’estime aussi que ce jeu a une dimension culturelle et intelligente. Si le jeu ne va pas apprendre des choses éblouissantes, il transcrit bien l’importance de certains bâtiments de l’époque, ainsi que le système de « clientèle » qui dans la Rome antique, signifiait bien un système d’employés ou de collaborateurs plutôt qu’une relation « client – distributeur » qu’on a maintenant.
Donc avec un peu de connaissance, on peut facilement donner à ce jeu une dimension pédagogique qui n’est pas désagréable.
Le seul point négatif que je trouve à ce jeu, et qui fait qu’au final, je ne le sors pas aussi souvent que je le voudrais, c’est le temps de jeu. Une partie peut prendre bien 1h30 – 2h00, facilement.
Pour une première partie, les règles peuvent paraître assez complexes, mais au final, on se retrouve dans des mécaniques familières et donc les joueurs réguliers ne vont pas tarder à retrouver leurs marques.
Fiche technique
Auteur : Carl Chudyk
Illustrateur : Igor Wolski
Éditeur : Lookout Games, Cambridge Games et Filosofia
Distributeur : Asmodée
Joueurs : 2 à 5
Durée : 60 minutes (officiellement)
Âge : 12 +
Plus de Gloire de Rome ?
Une extension est sortie, mais je n’ai pas encore eu l’occasion de la tester. Mais j’avoue que ce jeu est un tel bijou pour moi, que je vais acheter l’extension dés que je la trouve en magasin.
Un mode solo est proposé sur Boardgamegeek.
En tout cas, l’empereur peut encore brûler Rome et compter sur moi pour me relever les manches pour restaurer la gloire de Rome. Avec plaisir à chaque partie.
Jonathan