Echange autour de la place de la femme dans le monde ludique
Salut chère lectrice et cher lecteur,
Le 27 janvier, j’ai eu l’occasion de participer avec mes comparses, Yasmin et Jon, à une soirée dans la ludothèque d’Auderghem. Pour y jouer ? Non, pour y discuter d’un sujet important qui fait écho dans le jeu de société : la place de la femme dans le monde ludique.
Comme tu as pu le remarquer dans les jurys de prix ludique comme l’As d’or, parmi les auteurs de jeux connus et les influenceurs, il n’y a pas des masses de dames et pourtant, elles sont là ! Cependant le monde ludique, centré sur le partage, ne fait pas exception à la réalité : la femme, en 2023, est toujours effacée et mise en arrière-plan. Afin de mieux comprendre cette problématique, la ludothèque avait invité Tatiana de Girl Dot Game afin qu’elle partage son expérience en tant qu’influenceuse et passionnée du jeu de société.
Une soirée qui commence sur les chapeaux de roues
Venir à Auderghem pour des Namurois et un Beerselois, ce n’est pas évident. Tu dois éviter les routes barrées, zigzaguer entre les labyrinthes qu’on appelle « Good Move » mais le sujet nous tenait à cœur alors pas de souci. Enfin arrivé, je suis devant la bibliothèque, lumière éteinte. « Zut, c’est pas le bon jour » mais fort heureusement quelqu’un du centre culturel m’informe que la ludothèque est du côté du bâtiment et que je peux le traverser en passant par le parking souterrain.
5 minutes et quelques détours plus tard, je suis enfin arrivé. Jon et Yasmin me rejoignent, un problème de PC que notre cher Webmaster a réussi à résoudre… La soirée peut enfin commencer.
Petite description de l’ambiance
Je n’ai jamais été dans la ludothèque d’Auderghem. Ça me semble évident étant donné que j’étais un ancien Schaerbeekois qui avait sa ludothèque en face de chez lui. Lorsque je suis entré, la salle n’était pas très grande, mais cela n’empêche pas d’y trouver pas mal de jeux et surtout des très récents et vraiment dans le hype. J’avoue que si je ne devais pas faire 50 minutes, ça me botterait de la visiter régulièrement. Si tu veux en savoir plus sur la ludothèque, je t’en parlerai dans un prochain article 😉
Revenons à nos moutons. L’ambiance était très décontractée et, pour l’occasion, nous avions de quoi boire et grignoter. Parmi l’assemblée, il y avait tous les genres : des filles et des garçons. C’était bon signe, car cela prouve que le sujet intéressait tout le monde ! Après une dizaine de minutes, les organisatrices nous ont invité à nous installer. La présentation pouvait enfin commencer.
La présence féminine dans le jeu, en quelques chiffres
Vêtue de son costume de Super Woman et armée de son powerpoint, Tatiana était prête à nous plonger dans son histoire parsemée d’embûches et de faits incongrus.
Afin de bien commencer sa présentation, elle aborde l’origine du Monopoly. Ce blockbuster du jeu a été, en effet, créé par Elizabeth Magie, mais son nom a été effacé au profit de Charles Darrow qui n’a fait que racheter les droits (copier son jeu selon d’autres sources), Landlord’s Game. Ce dernier avait à l’origine un mode compétitif et un mode coopératif. Le mode coopératif a cependant été effacé dans la version Monopoly.
Voici une super vidéo qui résume bien l’histoire du Monopoly :
À côté de ça, différents chiffres criants mettent en exergue le peu de présence de femmes parmi les influenceurs alors qu’on sait que pour une majorité de joueuses et joueurs, on joue avec notre moitié.e !
« Mais non il y a plus d’experts masculins et ils sont plus présents sur les réseaux sociaux ! »
Comme dit mon chat quand il a faim, qui cherche, trouve ! Dans mon fil d’actualité par exemple, qui se résume aux jeux de société, cuisine et cinéma, j’ai beaucoup de posts d’influenceuses ludiques.
Elles sont là, elles font de chouettes posts avec des photos et vidéos bien travaillées et il y a pas mal d’interactions ! C’est une bonne source d’inspiration.
Une autre excuse qui vient s’ajouter à cette banalisation de l’injuste : les filles, elles aiment les jeux mignons et coopératifs. Si tu prends l’exemple de Girl Dot Game, elle est amatrice de gros jeux et pas seulement des jeux qui sentent la rose et crachent des arcs-en-ciel …
La suite de la soirée est remplie d’anecdotes et de chiffres qui sont présentés avec humour et il y avait pas mal d’échanges avec le public.
Ce ne sont que des chiffres et des allégations orientées venant d’une valkyrie hystérique…
Ce que disent souvent les détracteurs, mais je ne suis pas d’accord avec eux. Ces inégalités continuent bel et bien d’exister : c’est le reflet de notre société qui évolue, mais encore trop lentement. Néanmoins, les clichés ont la vie dure dans mon entourage d’amies :
- Samy a pour objectif de me pulvériser ainsi que son mari au jeu. Etre maman pour la deuxième fois ne l’a pas attendri…
- J’ai aussi Fiona qui rêve de rejouer à Feast for Odin quand ses deux enfants seront plus grands
- Maud adore jouer, même à des jeux qui durent des heures et on finit souvent vers 2h du matin et sans caféine sinon elle ne dort pas. Par contre, on le paie tous le lendemain quand les enfants se réveillent vers 07 h…
- Aurore de l’équipe est une duelliste addicte, peu importe le niveau de jeu tant que ça marche bien à deux.
Je suis certain qu’au fond de toi, chère lectrice, sommeille l’âme d’une hardcore joueuse de Dinosaur World (cocrée par Marissa Misura pour info).
Quand c’est féminin, c’est soit trop, soit trop peu
Si tu suis la page Girl Dot Game, tu remarques qu’elle se donne à fond dans le cosplay pour mettre le jeu et son thème à l’honneur. C’est vraiment du beau travail. Malheureusement, elle ne reçoit pas que des éloges. L’expérience de Bad Bones est le plus parlant lorsqu’on lui a reproché d’être un peu trop dénudée. Certains ne font que le penser, mais d’autres ne lésinent pas à exprimer leur opinion, car c’est si facile, protégés derrière un écran.
Elle a aussi mentionné une conférence sur le Community Management et son impact dans le rôle le jeu de société. L’un des thèmes était Instagram. À cette occasion, seules des Instragrameuses étaient invitées. On a crié au scandale alors que lors d’un évènement précédent sur Youtube, seuls des hommes étaient présents et personne n’a trouvé ça bizarre. La raison du choix de ces intervenants était en fait basée sur le top 20 des influenceurs sur chacun de ces réseaux. Il y avait en effet plus d’influenceuses sur Insta reconnues que sur Youtube.
La normalité : c’est féminin, non ?
Ce n’est que ma propre opinion mais j’ai l’impression que quand on est une femme, soit on en fait trop soit pas assez. Elle n’est pas assez apprêtée ou est trop jolie. On trouve toujours quelque chose à dire à une femme quand elle réussit. On attribue souvent ça à son physique ou à la discrimination positive (nouvelle excuse du beauf). Ne peut-on pas être une femme belle, férue de jeux de société et être une référence dans le jeu ?
Moi par exemple, je ne prétends à aucune expertise ludique, je suis juste un joueur passionné qui adore écrire et partager mes impressions. Suis-je plus légitime qu’une autre blogueuse ludique ? Bien sûr que non !
Une lumière au bout du tunnel
Le tableau n’est cependant pas tout noir. Il y a des choses qui bougent et des projets pour améliorer la représentativité homme-femme, même si parfois, c’est fait de manière maladroite (l’anecdote de la combinaison moulante dans The Crew pour représenter la cosmonaute m’a bien fait rire).
L’objectif n’est pas de mettre la femme sur un piédestal, mais qu’elle soit accueillie dans le monde ludique et qu’elle soit légitime. C’est pourquoi, Tatiana a terminé sa présentation sur 4 principes :
1) Des espaces non-mixtes
Le but est de favoriser les rencontres entre actrices ludiques : autrices, illustratrices, joueuses, etc … De ces rencontres, naîtront certainement des idées novatrices avec un œil neuf sur le monde ludique.
2) Les expertes
Invitons les femmes à s’exprimer lors des tables rondes. C’est en ouvrant le débat que celui-ci se nourrit et évolue.
3) La représentation
Il faut augmenter la visibilité des femmes dans les espaces visuels des jeux et ne pas revenir sur l’idée de la femme ornementale. C’est aussi une guerrière, une médecin, une avocate ou une informaticienne !
4) Célébrer
Mettre en avant les initiatives des femmes, leurs réussites. Ce que fait la ludothèque d’Auderghem en animant cette thématique pendant deux mois. D’ailleurs, la prochaine soirée jeux aura lieu le 10 mars prochain et on pourra jouer à des jeux créés par des femmes. Réserve vite, car les places sont limitées !
Quant à l’équipe, nous avons deux coéquipières super motivées que sont Yasmin et Aurore. Nous sommes vraiment ravis, car elles apportent vraiment un œil neuf à notre rapport avec les réseaux sociaux et proposent pas mal d’idées pour nous renouveler. Je trouve cependant qu’il n’y a pas encore assez de rédactrices dans l’équipe donc si tu es motivée à nous rejoindre, n’hésite pas à nous contacter !
Notre leitmotiv c’est de mettre en avant la Belgique ludique. Cela comprend aussi les actrices ludiques. C’est pourquoi nous tenions à écrire cet article ainsi que d’autres en rapport à celui-ci.
Conclusion
Ayant déjà lu quelques articles de Plato Magazine sur la question de la femme dans le monde ludique, le sujet ne m’était pas inconnu. Je suis d’ailleurs sensible au sujet. C’est pourquoi je suis venu avec beaucoup d’enthousiasme. En repartant, j’ai trouvé la soirée vraiment instructive. Tatiana était vraiment dans l’échange et donnait quelques pistes pour évoluer dans le bon sens.
Pourquoi un mec prend-il le parti des femmes ?
L’égalité et l’équité de la femme est un combat qui me concerne. Je suis en effet un amoureux de la différence et de l’inclusivité. L’un ne va pas sans l’autre. C’est pourquoi j’aime tant les jeux de société. Ils sont différents et ont des publics différents. On joue cependant ensemble autour de la table, seulement pour s’amuser et non pour une certaine « rentabilité ». On en ressort joyeux, parfois frustré d’avoir perdu, mais l’essentiel c’est d’avoir partagé un moment ensemble. Hé oui, le féminisme, c’est un combat pour les femmes par des femmes et des hommes.
Toute initiative, même minime, au profit de la femme dans le monde ludique fera bouger lentement, mais sûrement les choses.
Fiche technique
Quoi : Echange autour de la place de la femme dans le monde ludique par Girl Dot Game
Quand : 27 janvier 2023 de 19 à 21h
Où : Ludothèque d’Auderghem
Sources de Girl Dot Game:
– https://www.cardboardrepublic.com/articles/extra-pieces/gender-representation-in-board-game-cover-art
– https://www.elizhargrave.com/women-nonbinary-designers
– https://boardgamegeek.com/geeklist/296545/top-ranked-and-award-winning-games-women-people-ma
– https://boardgamegeek.com/geeklist/308223/reviewers-best-2022-meta-compilation